Article paru sur 24 ORE le 2 décembre 2010
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Comme on le présageait, le cadet des Guérini a été mis en examen par Charles Duchaine. Et incarcéré dans la foulée. Son frère, le sénateur et président du conseil général des bouches du Rhône, prend ses distances. Par ailleurs, nous avons retrouvé la trace d’un disparu...
C’est un coup de fil surprise. Une voix, au loin, qui demande à parler à la rédaction de 24 Ore. A l’autre bout du fil, René Nostriano.
Large. Le toujours président de la fédération régionale du BTP a brutalement mis de la distance avec Marseille et son ambiance délétère. Depuis l’été. Un départ souligné par notre journal, qui relevait que ce proche des frères Guérini avait suivi en cela l’exemple d’un autre notable phocéen : Marc Nabitz, l’homme des chantiers scolaires du département, ex-directeur de 13 Développement, qui a migré en Israël depuis février. A croire que le Mistral se transforme en vent du large.
Voyages. Au téléphone, Nostriano ne souhaite pas s’éterniser. Il a pris cette initiative, d’accord, mais ne veut pas trop parler. Juste apporter un « démenti ». Une interview, pour s’expliquer et aller au fond des choses ? Il n’est pas chaud. Finalement, le principe d’un rendez-vous est arrêté pour le lendemain – c’est à dire hier, jeudi. Nostriano, qui se trouve en… Pologne, acceptera au final de nous parler une petite dizaine de minutes, tout mouillé. Mais pas question de s’étendre pour répondre à nos nombreuses questions. Dommage, nous en avions des très précises.
Echéance. Dans cette courte interview (ci-dessus), Nostriano réfute la thèse de la fuite. Pourtant, d’après nos informations, le juge Duchaine a bien convoqué cet homme qui occupe une position centrale, en relation directe avec les collectivités. Une convocation à laquelle il ne s’est pas présenté. Et depuis, en dépit des recommandations de son entourage, le promoteur n’a plus retrouvé le chemin de Marseille, jusqu’à abandonner sa maison de l’avenue de la… Corse. Mais ceux qui l’attendent pourraient bientôt avoir la possibilité de le revoir. En effet, Nostriano nous a assuré qu’il serait à Marseille le... 14 décembre.
Banditisme. A Marseille, justement, Alexandre Guérini a été mis en examen par Duchaine. Et immédiatement incarcéré. D’après l’AFP, il a été confronté à Stéphane Brunengo-Girard, pour sa part incarcéré dans l’affaire des marchés publics truqués qui touchent le département de Haute Corse. Et dont les sociétés auraient servi à blanchir de l'argent du grand banditisme. Surprise, un nouveau grief s’est ajouté à ceux, nombreux (notre édition d’hier), de la justice à l’encontre d’Alexandre Guérini. Sa formulation fait mauvais genre : « détention d’un chargeur de pistolet glock (des armes de fabrication israéliennes, qui ont eu un certain succès en Corse, notamment au cœur des années 90) ». Pendant que les soucis du cadet se précisent, l’aîné est rentré. Lâchage. Dans un entretien accordé à la presse locale, Jean-Noël Guérini assure qu’il n’a rien à voir avec les affaires du petit. Lui, c’est lui, en somme. Même s’il « reste son frère ». Un peu facile, quand on sait combien Alexandre a été un pion essentiel, au cœur de son ascension politique, de la présidence de l’Opac et du Panier – où il a hérité du sigèen de conseiller général de son oncle – à la tête du département, de la fédération et à la conquête de la mairie de Marseille.
Ennemi. Si certains disparaissent des écrans radar, d’autres à Marseille sont bien visibles. Même s’ils restent un peu elliptiques. Renaud Muselier, ex-secrétaire aux Affaires étrangères et héritier potentiel de Gaudin est l’ennemi juré du clan Guérini. Qui l’accuse d’être à l’origine des lettres anonymes qui ont mis Duchaine sur la piste des affaires du clan. Un donneur, en somme. Muselier s’était offert un coup d’éclat en brandissant à la tribune de la communauté d’agglomération un exemplaire du Gomorra de Saviano. Une allusion transparente aux méthodes des équipes Guérini. Ce qui lui a valu de menus soucis. Notamment d’être pris à partie par Alexandre Guérini, dans l’enceinte du cercle des nageurs de Marseille, lieu de sociabilité des personnalités en vue et de la bourgeoisie locale.
Poissons. Il y a seulement deux semaines, Muselier s’est rendu à Paris, au ministère de l’Intérieur. Pour demander à Brice Hortefeux de ne pas l’oublier. Le député UMP, en effet, assure avoir reçu de nouvelles menaces. Et un avertissement, relayé par un très haut fonctionnaire de l’Etat, qui lui « aurait recommandé de... faire attention à lui ».
« Si je rate un virage, prévient Muselier, ce n’est pas que je conduis mal. Et si je donne à manger aux poissons, ce n’est pas que j’ai envie de me suicider. Ou que je suis dépressif ».
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3 questions à... René Nostriano, président de la fédération Paca du BTP, en exil en Suisse :
- 24 Ore : On dit que vous avez fuit Marseille après la série d’interpellations dans l’entourage de Jean-Noël Guérini, le président du conseil général socialiste des Bouches-du-Rhône. Est-ce exact ? C’est faux. Je ne suis pas du tout en fuite. J’ai une adresse, un numéro de téléphone – enfin, j’en ai plusieurs -, mes entreprises fonctionnent normalement, et tout le monde est au courant de mes affaires. Je ne comprends pas pourquoi on dit ça. Tout ce que je sais, c’est que ma famille a été très touchée par ces mauvaises informations. Vous savez, quand vous êtes un homme public, on vous regarde dès que ce genre de – excusez-moi du terme - conneries sort dans la presse.
- 24 Ore : Il n’y a donc aucun mandat d’amener lancé contre vous ? Absolument pas. Je n’ai jamais été convoqué ni par les gendarmes, ni par les juges. Et si j’avais été convoqué, j’y serais allé immédiatement. C’est bien la première fois que je me retrouve dans une telle situation.
- 24 Ore : Mais vous suivez quand même ce qu’il se passe à Marseille… Même pas. Je travaille à l’étranger, je travaille en Pologne, je travaille un peu partout en Europe. Je ne sais pas ce qui se passe exactement à Marseille. Enfin si… Je suis au courant, forcément, comme tout le monde… Mais je n’ai aucune envie de faire des déclarations là-dessus. Je n’ai rien à voir là-dedans. Point.
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