Article paru dans La Provence le 25 novembre 2010
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Liés avec l’affaire des marchés truqués de Haute-Corse, Bernard Barresi et les frères Campanella avaient établi une partie de leur "réseau mafieux" dans la ville minière.
Bernard Barresi et les frères Campanella étaient liés avec l’affaire des marchés truqués de Haute-Corse qui a éclaté la semaine dernière. Dans leur "réseau mafieux", Gardanne occupe une place de choix.
L'ancienne ferme semble oubliée dans la campagne, le long d'une maigre route qui serpente jusqu'à Aix. Quelques bâtiments et deux entrepôts, le tout soigneusement clôturé, avec un molosse qui décourage les curieux. Un des rares voisins évoque bien des "allées et venues", se souvient que "les gens d'ici disaient des choses" : "Mais cela ne me regardait pas, alors..." Pourtant, ce coin de nature tient une place centrale dans la galaxie de Bernard Barresi.
La villa où il se cachait avec Carole Serrano, sa compagne, n'est qu'à quelques centaines de mètres. Surtout, les bâtisses abritaient les sièges d'une myriade de sociétés. Officiellement, elles étaient logées à des numéros différents, ce qui empêchait de les relier entre elles lorsqu'elles répondaient à un appel d'offres lancé par une collectivité territoriale. Sauf qu'une fois sur place, le masque tombe : 807, 835, 845, toutes les plaques renvoient à la même propriété. L'une d'elles est brisée. Seul signe visible, une poignée de boîtes aux lettres. Elles sont marquées d'une dizaine de noms et de sociétés dont certaines ont pu être utilisées pour blanchir de l'argent, fausser des marchés publics ou plus simplement capter dans l'économie légale des millions d'euros qui alimentaient ensuite tout le système.
C'est ainsi qu'étaient domiciliées là plusieurs structures gérées par la compagne de Bernard Barresi elle-même, comme Organisation bâtiment rénovation et surtout Alba Événement : en 2008, cette société de sécurité revendiquait 143 salariés et un chiffre d'affaires de 4,4 millions d'euros, avec des clients comme l'OM, le Cnseil général des Bouches-du-Rhône(1), l'Opac Sud, l'AP-HM, HMP...
Les petites maisons abritaient aussi des sociétés pilotées par Patrick Boudemaghe et Damien Amoretti, tous deux écroués dans l'affaire des marchés truqués de Haute-Corse. Ainsi la SCI Chloé et ABT, une entreprise de bâtiment créée en 2001. Les deux hommes étaient connectés avec un vaste réseau international de blanchiment d'argent, qui passait par l'Espagne, l'Angleterre, la Pologne, les États-Unis...
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"Damien, un bon petit jeune"
Dans le quartier, tout le monde connaît bien Damien Amoretti. La ferme était celle de son grand-père. "Un bon petit jeune, je ne sais pas ce qui a pu lui arriver", commente l'une. "Il a perdu son père à 3 ans, ça l'a beaucoup marqué, ajoute un autre. Mais ce n'est pas une excuse".
Selon nos informations, les enquêteurs s'intéressent également beaucoup à la SMAD, une société-holding qui a été discrètement domiciliée dans la maison de Gardanne. Montée en mai 2006 par Damien Amoretti, elle entre le mois suivant pour 49% dans le capital de la SMA Vautubière, une entreprise créée spécialement pour exploiter la décharge de La Fare-les-Oliviers, un marché remporté l'année précédente par Alexandre Guérini, le frère du président PS du Conseil général des Bouches-du-Rhône. Courant 2007, Damien Amoretti est remplacé à la tête de la SMAD par Philippe Rapezzi, l'homme de confiance d'Alexandre Guérini. Il faut toutefois attendre le 12 janvier 2009 pour que la société abandonne Gardanne pour s'installer à Marseille, dans la zone franche. Suffisamment loin du voisinage de Bernard Barresi ?
(1) Elle a perdu cet été le dernier contrat de surveillance qui la liait au Conseil général des Bouches-du-Rhône.
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