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De nouvelles perquisitions ont visé l'entourage d'Alexandre Guérini, le frère du président du conseil général des Bouches-du-Rhône.
Les perquisitions, conduites à la veille de Noël, n'avaient jusqu'à présent pas été relayées par la rumeur du Vieux-Port. Le 23 décembre dernier, c'est en effet en toute discrétion que les gendarmes de la cellule «déchets 13» se sont une nouvelle fois invités au domicile d'Alexandre Guérini, entrepreneur spécialisé dans le traitement des déchets et frère du président du conseil général des Bouches-du-Rhône. La veille, une société dirigée par l'un de ses très proches amis, Queyras Environnement, avait également reçu la visite des enquêteurs. Agissant sur commission rogatoire du juge Charles Duchaine, ceux-ci s'intéressent notamment aux relations que cette entreprise spécialisée dans le tri et le recyclage des déchets semble avoir nouées avec la communauté urbaine Marseille Provence métropole (MPM).
Ces investigations, qui font suite aux perquisitions menées début décembre dans les locaux de MPM et du conseil général, s'inscrivent dans le cadre d'une enquête tentaculaire menée depuis plusieurs mois à Marseille. À l'origine de cette procédure, une lettre anonyme postée en février 2009 décrit un vaste «système» mêlant corruption, entente sur les marchés publics ou encore détournement de subventions associatives. À en croire le «corbeau», Alexandre Guérini en serait le pilier occulte. Il jouerait notamment de son influence supposée auprès de son frère Jean-Noël, ainsi que sur certains décideurs locaux, pour mettre le marché des déchets en coupe réglée.
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« Nous marchons sur des œufs »
«Très circonstanciée» , selon une source judiciaire, cette dénonciation n'en est pas moins traitée avec la plus grande prudence par les magistrats marseillais. «Nous marchons sur des œufs, de crainte d'être instrumentalisés par des manœuvres politiques qui visent possiblement à déstabiliser le président du conseil général» , explique un proche du dossier. Dans l'entourage d'Alexandre Guérini, on souligne aussi que les lettres anonymes ont été postées au moment précis où le marché du traitement des ordures marseillaises subit une profonde réorganisation.
Chargés de l'enquête, les gendarmes de la section de recherches ont commencé par conduire de discrètes surveillances autour d'Alexandre Guérini. Le 18 novembre dernier, ils ont aussi perquisitionné la modeste HLM qu'il loue dans le centre-ville, ainsi que la vaste maison avec piscine et jacuzzi intérieurs dans laquelle il réside plus fréquemment, dans le quartier du Prado. Au fil de leurs écoutes téléphoniques, les enquêteurs ont eu la surprise de constater que ce quinquagénaire au verbe truculent se flatte volontiers, en privé, d'exercer son influence sur divers élus socialistes. Ils ont aussi mis au jour ce qu'on pourrait appeler un relatif laxisme dans la gestion de ses entreprises. L'une d'elles rémunérerait l'une de ses proches amies qui, selon plusieurs témoins, n'y aurait pourtant jamais été vue. De même, ils relèvent qu'une Mercedes ML 320 acquise par cette structure lui aurait été attribuée à titre personnel. «Pour l'heure, rien ne confirme l'existence d'un système mafieux» , assure toutefois une source proche de l'enquête, qui insiste : «à plus forte raison, rien ne permet d'accrocher Jean-Noël Guérini».
Au printemps, un deuxième courrier anonyme a plus spécifiquement attiré l'attention de la justice sur Queyras Environnement. Cette entreprise était alors pressentie pour décrocher, en partenariat avec une filiale locale de Veolia, un important marché de «transfert, tri et valorisation» concédé par MPM. Or, les élus UMP et communistes ont refusé d'entériner le choix des services techniques, jugeant que l'«offre» à 17 millions d'euros faite par Queyras Environnement était sensiblement moins intéressante que celle de son concurrent. La filiale de Suez, en effet, proposait de fournir la même prestation pour… 12,7 millions d'euros.
Désormais chargés d'enquêter sur le marché des déchets, les gendarmes s'efforcent de déterminer si les dirigeants de MPM n'ont pas tenté de rompre l'égalité d'accès aux marchés publics. Réfutant ces soupçons, les responsables de Queyras Environnement affirment eux, que la qualité de leurs prestations suffit à expliquer la différence des tarifs proposés. Quant à Alexandre Guérini, il se mure dans le silence et jure désormais à ses proches qu'il sait qui est le mystérieux «corbeau».
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