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Chaude ambiance sur la Canebière. Lundi 9 novembre, en pleine séance de la communauté urbaine de Marseille, I'UMP Renaud Muselier s'est avance vers Le président PS Eugène Caselli pour lui offrir un petit cadeau ; « Gomorra », Le bouquin de Roberto Saviano sur la Camorra napolitaine. Le tout, en criant ; « Marseille, ce n'est pas Naples! » Oh fan ...
Comme on dit, depuis, sur Ie Vieux-Port, « Muselier s'est lâché ». Pourtant, en accusant la gauche d'avoir géré « à la napolitaine » la récente crise des ordures a Marseille, il a fait sourire jusque dans les rangs socialistes, ou certains s'interrogent aussi sur les vraies raisons du coup d'éclat de Caselli. Le 4 novembre, en effet, pour mettre fin a la grève des éboueurs, Ie patron PS de I'agglomération n'y est pas allé de main morte. Il a subitement décrété l'annulation d'un gros marche de ramassage des ordures dans Le centre-ville, attribue au géant danois ISS, au détriment de la société locale Bronzo.
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A l'origine de ce choix, les membres de la commission des marches (trois élus UMP et un PC contre deux PS) n'avaient pourtant pas force sur le pastis avant de voter; ISS réclamait 61,5 millions et disposait d'une cinquantaine d'agents de plus que Bronzo, dont l'offre n'était pas donnée (65,7 millions). Les dirigeants de Bronzo ont mal pris l'affront et lancé la grève.
Officiellement, Caselli a fini par céder sous la pression mal¬odorante des poubelles qui s'en¬tassaient dans les rues depuis six jours. En réalité, d'autres pressions l'ont un peu aidé à capituler; celles du grand chef PS des Bouches-du-Rhône, Jean-Noel Guérini, et de son frérot, Alexandre, autre éminent socialiste et manitou local du traitement des ordures.
Le 24 octobre, soit trois jours après la décision de la commission des marches, quelques socialistes ont ainsi pu assister a une drôle de scène à Berre-l'Etang, commune voisine de Marseille. A l'issue d'une réunion interne du PS, Jean-Noël Guérini a pris Caselli a part pour lui dire tout le mal qu'il pensait de l'attribution du marche au danois ISS. Le ton est vite monté entre ces deux vieux camarades. Soudain, Caselli a envoyé valdinguer une chaise a coups de pied, avant de lâcher un peu fort, devant témoins : « J'irai pas en prison pour vous !» Motif de l'embrouille : Guérini venait tout bonnement de demander a son fidele second d'user de son pouvoir de président de la communauté urbaine pour casser l'appel d'offres. Mais, joint par « Le Canard ", l'intéressé nie : «Ce n'est pas vrai, je le jure. On s'est accrochés sur la stratégie pour les régionales. Je n'ai jamais pesé sur Eugene. Et Bronzo, je m'en tape!»
Une autre sévère engueulade a eu lieu peu de temps après, en pleine grève, dans Ie bureau de Caselli. Ce dernier campant sur ses positions, Jean-Noel Guerini, accompagne de proches collabo¬rateurs et de son frangin Alexandre, est revenu a la charge, lui rappelant gentiment tout ce qu'il lui devait ; « On t'a donne la présidence de la communauté. » Et Caselli de rétorquer ; « Eh bien, si vous la voulez, vous la reprenez ! »
Finalement, ce pauvre Caselli - coince, peuchère, entre ses tas d'immondices et la famille Guérini - a jeté l'éponge. Alors qu'il parlait encore, la veille, d'attaquer Bronzo en justice, il a brusquement décidé d’annuler toute la procédure et de lancer un nouvel appel d'offres. Jusqu'à ce que Bronzo soit retenu ? « C'est que cela devient une habitude, ironise un élu UMP. L'été dernier, la gauche avait déjà tente de revenir sur un marche de tri sélectif qui avait échappé a Bronzo. »
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C'est une longue histoire. Bronzo est une filiale de la Société des eaux de Marseille, elle-même filiale de Veolia, groupe avec lequel les Guerini entretiennent une vieille amitié. Comme l'a déjà raconté « Le Canard ", Jean-Noël Guérini a occupé, entre 1990 et 1995, d'obscures fonctions à la Sarp, une branche de la Générale des eaux (devenue Veolia) spécialisée dans les déchets toxiques, pour laquelle il allait se promener tous les deux mois en Italie, moyennant 20 000 F mensuels. Quant à Alexandre, gestionnaire de plusieurs décharges locales et patron de La Vautubière, une entreprise du secteur en pleine sante (7,5 millions de chiffre d'affaires), il s'est vu confier a plusieurs reprises des missions par Veolia. C'est du propre.
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